Je suis en Italie, au bureau-chef de l’une des plus grandes marques de vêtements de vélo, Castelli. Hier, j’ai eu mon baptême des Dolomites: une ride jusqu’au sommet de la Monte Grappa, accompagnée de cyclistes endurcis. Disons seulement que le parcours s’est avéré plus vertical que ce à quoi le Québec m’a habitué. Mes jambes de cycliste enthousiaste n’en sont toujours pas remises.
On m’accompagne à travers les couloirs, décorés d’objets tout droit sortis de la mecque du cyclisme – pensez entre autres à un maillot autographié et au vélo du vainqueur du Giro d’Italie – vers une salle de conférence dont la petite fenêtre me laisse entrevoir les pics montagneux. J’y attends mon invité, en retard. Je me suis faite à l’idée, ici tout le monde est toujours à l’heure italienne.
Celui que j’attends c’est Andrea Peron, directeur de la performance chez Castelli et fort d’une carrière professionnelle qui a duré 15 ans. Avec un titre de champion du monde du contre-la-montre par équipe, une médaille d’argent des Jeux olympiques de Barcelone et une 10e place au Tour de France, dire que Peron est un expert en termes de vélo est un euphémisme. Qui de mieux placé que lui pour me parler des produits Castelli et de la rigueur de l’aspect professionnel du cyclisme?
Il arrive finalement, espresso à la main et arbore son meilleur winning smile qui me fait immédiatement oublier son retard. Il porte un t-shirt Castelli et un jean à la mode, un look décontracté qui va de pair avec la personnalité de l’homme charismatique et humble qui se trouve devant moi.
AS: Andrea, merci de nous recevoir. C’est un honneur de faire votre connaissance et de rider les routes italiennes avec l’équipe de Castelli.
AP: Laisse-moi te poser la première question. Comment s’est passé l’ascension de la Monte Grappa?
AS: Je ne m’attendais à une montée aussi soutenue! Elle m’a donné du fil à retordre. C’est bien loin de ce que j’ai l’habitude de rouler au Québec.
AP: J’ai voyagé partout, mais je n’ai jamais fait de vélo au Canada. J’adorerais y aller, vous avez maintenant la plus longue piste cyclable au monde.
AS: On vous y attend. À votre place j’apporterais le maillot Climber que j’ai eu l’occasion de tester hier, parce qu’il peut faire vraiment chaud en été. Heurement qu’il est léger et respirant, on cuisait lors de l’ascension de la Grappa hier.
Parlant de produits, quel est votre indispensable parmi la collection Castelli ?
AP : Le manteau IDRO en Gore-Tex qui peut faire la différence lors d’une longue randonnée. Il est tellement léger et compressible que je le glisse dans la poche arrière de mon maillot pour être toujours prêt à le sortir en cas de pluie… et c’est souvent le cas en montagne.
AS: Et niveau short à chamois?
AP: Rien plus confortable que le bib Free Aero Race 4 celui qui est utilisé par les coureurs de la Team Sky. Avec son chamois Progetto X2 Air, c’est vraiment le plus évolué de la collection.
AS : J’ai d’ailleurs eu l’occasion de le tester hier. Je dois dire que j’ai vraiment été surprise par sa respirabilité et son niveau de confort. Peut-on dire que sont les caractéristiques principales de la collection?
AP: Ça doit l’être, les Tours ont souvent lieu par temps très chaud. S’il fonctionne pour nos équipes pros, il fera également l’affaire pour nos clients. Heureusement, l’innovation a bien évolué depuis l’époque où j’étais coureur.
AS: En parlant d’être pro, c’est votre rôle chez Castelli de faire le pont entre la compagnie et les équipes commanditées par la marque?
AP: Exactement. Je suis directeur de la performance. Je fais la liaison entre les équipes et la compagnie en elle-même. Mon rôle est donc de communiquer les nouvelles idées des coureurs pros à la compagnie et vice versa.
Je suis également responsable de tous les aspects de la recherche et du développement, et de l’innovation. Les cyclistes professionnels testent les produits Castelli et je m’assure que les commentaires et les corrections à apporter aux vêtements soient pris en compte dans la collection régulière.
AS: Vous accordez beaucoup d’importance à la contribution des équipes professionnelles au développement des produits?
AP: Fournir des vêtements aux équipes pros est, selon nous, la meilleure façon de tester nos produits. Après tout, les cyclistes professionnels passent énormément de temps sur leur vélo, ils sont les mieux placés pour nous dire ce qui marche et qui ne va pas dans leurs vêtements.
AS: On a croisé Steve Smith, votre brand manager hier. Il avait le maillot de la Team Sky pour la prochaine saison dans les mains. Il s’est dépêché de le cacher avant qu’on ait le temps de l’apercevoir comme il faut. Pouvez-vous m’en dire plus?
Comme réponse, Andrea se contente de porter son café à sa bouche, sourire en coin. J’imagine qu’on va devoir attendre au dévoilement officiel.
AS: Andrea, vous êtes un ancien cycliste professionnel et avez notamment remporté le titre de champion du monde au contre la montre par équipe. Pouvez-vous nous décrire votre expérience?
AP: (Rires) C’était en 1991… il y a donc très longtemps. J’ai eu la chance d’être professionnel durant 15 ans. J’ai pris le départ des plus grandes courses comme le Tour de France et le Giro d’Italie à plusieurs reprises, ainsi que toutes les autres courses classiques.
AS: C’est comment de se dire qu’on peut vivre de sa passion?
AP: C’est une grande chance que très peu de gens ont. Mais en toute honnêteté, le monde du cyclisme est moins glamour qu’on le croit.
AS: Que voulez-vous dire?
AP: C’est une expérience exaltante, mais difficile pour le corps et le mental. Je ne connais pas grand monde qui sont prêt à passer plus de 200 km assis sur une selle en plastique dans une position assez inconfortable.
AS: J’imagine qu’en plus des courses, vous deviez consacrer beaucoup d’heures à l’entrainement.
AP: C’est vrai. Les pros ont l’habitude de répartir leurs entrainements sur toute la semaine pour avoir le temps de récupérer entre les courses. En général, je m’entrainais environ 6 heures par jour, 3 fois par semaine.
AS : Comment fonctionne une équipe cycliste professionnelle et quel était votre rôle au sein de celle-ci?
AP: Le cyclisme n’est pas un sport individuel. Le leader a besoin d’une bonne équipe de coureurs pour l’amener à l’avant du peloton et l’aider à remporter une étape.
Au début j’avais plus de potentiel de gagner des courses. Plus tard j’ai préféré aider ceux qui avaient plus de potentiel pour gagner. J’étais assez polyvalent : j’ai un titre de champion du monde de contre la montre et j’étais plutôt bon grimpeur si les montées n’étaient pas trop abruptes. J’ai tout de même réussi à obtenir une 10e place au Tour de France en 1999.
AS: Sans parler de votre médaille d’argent aux JO de Barcelone. Qu’est-ce que ça fait de se classer dans le top 10 d’une grande course?
AP: C’est certainement parmi les plus beaux moments de ma carrière. Par contre, passer du top 10 au top 5, ou même accéder au podium est vraiment une tout autre affaire!
AS : Durant vos années de professionnel, qu’aviez-vous l’habitude de manger la journée d’une course?
AP: Lors d’une étape d’une journée, un cycliste peut facilement dépenser jusqu’à 4000 calories. Le défi, c’est vraiment de diversifier ses repas. Laissez-moi vous dire qu’on se fatigue vite de manger des pâtes pendant 3 semaines, même si en tant qu’Italien j’adore les pâtes!
AS : En tant qu’ex-professionnel, est-ce que ça vous arrive de ne pas avoir envie de faire du vélo?
AP: Certainement! Il y a des jours où je n’ai pas du tout envie de rouler. S’il pleut ou si le temps est mauvais ou si la température est aussi cuisante qu’hier.
AS: Quand vous pensez à votre carrière professionnelle, de quoi êtes-vous le plus fier?
AP: C’est difficile d’isoler une seule chose, je dirais que c’est surtout le sentiment d’être allé au bout de ce que je pouvais accomplir qui me rend fier.
AS: Et par apport à votre implication chez Castelli?
AP: Je suis fier de contribuer à l’innovation et au développement des vêtements de vélo. Mon rôle chez Castelli me permet de m’assurer que les amateurs qui achètent du Castelli bénéficient des mêmes technologies que les cyclistes qui roulent sur le circuit professionnel. On peut dire que c’est ma façon de redonner à la communauté qui m’a beaucoup soutenu tout au long de ma carrière.
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