Rédaction par Simon Ruel, rédacteur chez Altitude Sports.
Traduction: Reilly Doucet
La tête dans les Alpes: pourquoi j’ai passé l’été à rêver d’hiver
Marie-Hélène Choquette Zaurrini, directrice de marque chez Altitude Sports, est allée à la rencontre des gens de chez Rossignol en France pour découvrir ce qui fait de la marque l’institution qu’on connaît, et les projets sur lesquels elle planche. Et pour skier un peu...
«Les composants doivent être positionnés au dixième de millimètre près», m’explique Alexandre Rabatel, coordonnateur du mythique atelier de Rossignol, où sont fabriqués à la main les skis de course de la marque. On se promène lentement entre les machines. Ça sent le bois et la colle. Chaque spécialiste s’affaire à son poste, l’un manipulant une série de petites presses, l’autre peaufinant la cambrure d’une planche.
- Comment est-ce qu’on détermine la courbe parfaite, monsieur l’artisan?
- On y passe sa vie…
Jour 1: De tradition et de modernité
Je suis en visite chez Rossignol pour quelques jours, le temps de m’imprégner de l’esprit de la marque, de skier et de rencontrer des passionnés de montagne. On est à St-Jean-de-Moirans, près de Grenoble, où perdure une tradition de fabrication de skis maintenant centenaire.
Ici chaque carre, faite à 100% d’acier recyclé, est taillée à la main. Avec une minutie extrême, les skis sont assemblés et moulés, puis soumis au test de brisure, dans une chambre froide où il fait moins trente degrés Celsius. Ils sont destinés aux athlètes de la Coupe du Monde, dont l’apport au design est fondamental.
La relation entre Rossignol et ses skieurs et skieuses n’est pas sans rappeler celle de l’instrumentiste avec son luthier. Les athlètes sont en constante communication avec la marque, et leurs besoins guident la fabrication de ces skis destinés à la plus haute performance. C’est ainsi que Rossignol conçoit des skis parmi les meilleurs au monde, en mettant une tradition extrêmement riche au service de conceptions modernes à la fine pointe du design.
Jour 2: Ski(doo) de printemps
Je suis malade. Congestionnée et jet-lagged, je somnole dans la dameuse (!) qui nous emmène vers le sommet de la montagne fermée, rendue accessible spécialement pour nous. Mais les conditions sont idéales, à tel point que j’en oublie vite mon rhume. Le véritable héros de ma journée: l’ensemble de ski SKPR 3L, dont la coquille est faite en SympaTex, une membrane imper-respirante qui n’a rien à envier aux meilleures, mais qui a l’avantage d’être 100% recyclable.
Je suis accompagnée de Hugo Laugier et Ludovic Guillot-Diat, deux athlètes Rossignol respectivement freeskier et snowboarder, qui se crinquent mutuellement toute la journée. La complicité évidente entre les deux athlètes est à l’image de l’esprit familial qui règne dans la communauté élargie de Rossignol. C’est d’ailleurs un ami de la famille, accessoirement directeur de la station, qui s’amuse à nous tirer les gars et moi en haut de la montagne à toute allure sur son skidoo.
Avec le directeur de marque Grégory Delamare qui s’est joint à nous, ça jase bibs, coquilles, légèreté et minimalisme. En épiant ces conversations à flanc de montagne, Rossignol m’apparaît plus que jamais comme une marque dont la tradition, c’est d’innover.
Jour 3: Crème solaire et premières traces
On s’en va faire les premières traces en partant de l'Aiguille du Midi, plus haut sommet desservi par les Arcs, la station de ski située au cœur des Alpes françaises. Le soleil brille dans un ciel sans nuages, en cette mi-avril clémente. On m’a prêté des skis all-mountain Rallybird 92, que je me fais déjà un plaisir de tester dans ces conditions de rêve.
Mon guide est nul autre que l’inimitable Enak Gavaggio. Avec son éternelle moustache à la Salvador Dali, son image un peu punk contraste avec celle de Rossignol, mais son attachement à la marque qui le soutient depuis ses débuts est profond. Sous ses airs iconoclastes, le septuple médaillé des X-Games a un grand respect pour la tradition. En cette superbe matinée, il a apporté des croissants au sommet pour les patrouilleurs, qu’il se fait un devoir de remercier à chaque occasion pour le travail qu’ils accomplissent dans l’ombre.
Les premières traces, donc. Seule la dameuse est descendue avant nous, et la texture de corduroy qu’elle a laissée derrière est immaculée. Je m’offre une descente juste à moi: le premier coup de couteau dans un gâteau de fête; un plongeon dans l’eau glaciale d’un lac désert. Mes Rallybird 92 mordent avec grâce, la prise de carre est excellente. Ils sont stables et je gagne en confiance à chaque virage. De vitesse, de lumière et de vent, une larme me chatouille la joue.
Jour 4: Suit de ski en terrasse
Je suis attablée en montagne sur une terrasse pour le lunch. Le soleil est assez bon pour manger dehors; la bouffe simple, mais sublime. Magali fait une blague que je n’entends pas - j’ai la tête dans les Alpes - et les autres convives rigolent: Greg, Hugo, Enak… Tout le monde est là pour ce dernier moment à partager avant mon départ.
Magali, c’est Magali Vauge, ingénieure textile qui supervise toute la division vêtements chez Rossignol. Je l’ai rencontrée plus tôt pour parler de la philosophie de la marque en matière de design, et elle m’a tout de suite impressionnée. Hyper chic, elle porte un ensemble de la collection Jean-Charles de Castelbajac qui lui sied à ravir. En même temps, elle dégage cette énergie cool, un peu ski bum, qui ajoute un petit mystère de charme à son élégance.
- Magali, je trouve que les vêtements que j’ai eu l’occasion de porter durant mon séjour sont plus flatteurs que le linge de ski auquel je suis habituée…
- Absolument. Chez Ross, si un vêtement ne met pas la personne en valeur, s’il n’a pas cette élégance à la française, il ne verra pas le jour dans la collection. On s’adapte aux modes, mais on ne se dénature pas.
Elle a le sens de la formule aussi, Magali.
Si l’ADN des vêtements Rossignol est fait d’élégance et de performance, leur fabrication doit se faire dans le respect de l’environnement, et ce chaque année davantage. Signataire de la Fashion Industry Charter for Climate Action, Rossignol n’utilise pas de fourrure animale. De plus, le duvet et le cuir qu’elle utilise doivent être des sous-produits de la filière agroalimentaire. En fait, la marque favorise même le duvet synthétique, à plus de 60%. Engagée à réduire son empreinte carbone de 30% d’ici 2030, la compagnie vise la carboneutralité en 2050. D’ici 2025, elle compte avoir réduit sa production de déchets de 40%.
Côté skis, son nouveau Essential de all-mountain est fait de 60% de matières recyclées, mais sera recyclable à plus de 75%. La différence est remarquable: un ski conventionnel est en moyenne recyclable à seulement 10%. Le plus beau? L’Essential sera fabriqué à Sallanches, au cœur des Alpes.
Quand je vous disais que j’avais découvert en Rossignol une institution au regard tourné vers l’avenir…